Страница:
— Oh, il a represente ta peau d'une facon tellement exacte… D'ailleurs, c'est un veuf aux joues ardentes et qui possede un service a cafe tres remarquable… Je crois bien qu'il connaisse ton corps non seulement comme medecin, mais aussi comme adepte d'une autre discipline de lettres humaines.[191]
— Tu as decidement raison de dire que tu parles en reve, mon ami.[192]
— Soit… Laisse-moi rever de nouveau apres m'avoir reveille si cruellement par cette cloche d'alarme de ton depart. Sept mois sous tes yeux… Et a present, ou en realite j'ai fait ta connaissance, tu me parles de depart![193]
— Je te repete, que nous aurions pu causer plus tot.[194]
— A ты хотела бы этого?
— Moi? Tu ne m'echapperas pas, mon petit. Il s'agit de tes interets, a toi. Est-ce que tu etais trop timide pour t'approcher d'une femme a qui tu parles en reve maintenant, ou est-ce qu'il y avait quelqu'un qui t'en a empeche?[195]
— Je te l'ai dit. Je ne voulais pas te dire «vous».[196]
— Farceur. Reponds donc, — ce monsieur beau parleur, cet Italien-la qui a quitte la soiree, — qu'est-ce qu'il t'a lance tantot?[197]
— Je n'en ai entendu absolument rien. Je me soucie tres peu de ce monsieur, quand mes yeux te voient. Mais tu oublies… il n'aurait pas ete si facile du tout de taire ta connaissance dans le monde. Il y avait encore mon cousin avec qui j'etais lie et qui incline tres peu a s'amuser ici: Il ne pense a rien qu'a son retour dans les plaines, pour se faire soldat.[198]
— Pauvre diable. Il est, en effet, plus malade qu'il ne sait. Ton ami italien du reste ne va pas trop bien non plus.[199]
— Il le dit lui-meme. Mais mon cousin… Est-ce vrai? Tu m'effraies.[200]
— Fort possible qu'il aille mourir, s'il essaye d'etre soldat dans les plaines.[201]
— Qu'il va mourir. La mort. Terrible mot, n'est-ce pas? Mais c'est etrange, il ne m'impressionne pas tellement aujourd'hui, ce mot. C'etait une facon de parler bien conventionnelle, lorsque je disais «Tu m'effraies». L'idee de la mort ne m'effraie pas. Elle me laisse tranquille. Je n'ai pas pitie — ni de mon bon Joachim ni de moi-meme, en entendant qu'il va peut-etre mourir. Si c'est vrai, son etat ressemble beaucoup au mien et je ne le trouve pas particulierement imposant. Il est moribond, et moi, je suis amoureux, eh bien! — Tu as parle a mon cousin a l'atelier de photographie intime, dans l'antichambre, tu te souviens.[202]
— Je me souviens un peu.[203]
— Donc ce jour-la Behrens a fait ton portrait transparent![204]
— Mais oui.[205]
— Mon dieu. Et l'as-tu sur toi?[206]
— Non, je l'ai dans ma chambre.[207]
— Ah, dans ta chambre. Quant au mien, je l'ai toujours dans mon portefeuille. Veux-tu que je te le fasse voir?[208]
— Mille remerciements. Ma curiosite n'est pas invincible. Ce sera un aspect tres innocent.[209]
— Moi, j'ai vu ton portrait exterieur. J'aimerais beaucoup mieux voir ton portrait interieur qui est enferme dans ta chambre… Laisse-moi demander autre chose! Parfois un monsieur russe qui loge en ville vient te voir. Qui est-ce? Dans quel but vient-il, cet homme?[210]
— Tu es joliment fort en espionnage, je l'avoue. Eh bien, je reponds. Oui, c'est un compatriote souffrant, un ami. J'ai fait sa connaissance a une autre station, balneaire, il y a quelques annees deja. Nos relations? Les voila: nous prenons notre the ensemble, nous fumons deux ou trois papiros, et nous bavardons, nous philosophons, nous parlons de l'homme, de Dieu, de la vie, de la morale, de mille choses. Voila mon compte rendu. Es-tu satisfait?[211]
— De la morale aussi! Et qu'est-ce que vous avez trouve en fait de morale, par exemple?[212]
— La morale? Cela t'interesse? Eh bien, il nous semble qu'il faudrait chercher la morale non dans la vertu, c'est-a-dire dans la raison, la discipline, les bonnes moeurs, l'honnetete, — mais plutot dans le contraire, je veux dire: dans le peche, en s'abandonnant au danger, a ce qui est nuisible, a ce qui nous consume. Il nous semble qu'il est plus moral de se perdre et meme de se laisser deperir que de se conserver. Les grands moralistes n'etaient point des vertueux, mais des aventuriers dans le mal, des vicieux, des grands pecheurs qui nous enseignent a nous incliner chretiennement devant la misere. Tout ca doit te deplaire beaucoup, n'est-ce pas?[213] Великие моралисты вовсе не были добродетельными, они были порочными, искушенными в зле, великими грешниками, и они учат нас по-христиански склоняться перед несчастьем. Все это тебе, наверно, очень не нравится, правда?]
Он молчал. Он сидел все в той же позе, скрестив ноги под скрипучим креслом, наклонившись к лежащей женщине в бумажной треуголке, держал в руке ее карандаш и смотрел голубыми, как у Ганса-Лоренца Касторпа, глазами в глубину опустевшей комнаты. Пациенты разошлись. Звуки пианино, стоявшего в углу наискосок от обоих, лились теперь тихо и неровно, больной мангеймец наигрывал одной рукой, а подле него сидела учительница и листала какие-то ноты, лежавшие у нее на коленях. Когда беседа между Гансом Касторпом и Клавдией Шоша оборвалась, пианист совсем снял руку с клавиатуры и опустил ее, а фрейлейн Энгельгарт продолжала смотреть в нотную тетрадь. Четверо оставшихся от общества, которое веселилось здесь в карнавальную ночь, сидели неподвижно. Безмолвие продолжалось несколько минут. Медленно, все ниже и ниже склонялись под его грузом головы той пары у пианино, голова мангеймца — к клавиатуре, а фрейлейн Энгельгарт — к нотной тетради.
Наконец, точно по безмолвному соглашению, мангеймец и учительница тихонько встали и тихонько, втянув голову в плечи и деревянно опустив руки, стараясь не оглядываться на еще не опустевший угол, неслышно вышли вместе в читальню и удалились.
— Tout le monde se retire[214], — сказала мадам Шоша. — C'etaient les derniers; il se fait tard. Eh bien, la fete de carnaval est finie.[215] — И она подняла руки, чтобы снять бумажный колпак со своих рыжеватых кос, обвивавших венком ее голову. — Vous connaissez; les consequences, monsieur.[216]
Но Ганс Касторп помотал головой, не открывая глаз и не меняя своей позы. Он ответил:
— Jamais, Clawdia. Jamais je te dirai «vous», jamais de la vie ni de la mort, если можно так выразиться, а следовало бы. Cette forme de s'adresser a une personne, qui est celle de l'Occident cultive et de la civilisation humanitaire, me semble fort bourgeoise et pedante. Pourquoi, au fond, de la forme? La forme, c'est la pedanterie elle-meme! Tout ce que vous avez fixe a l'egard de la morale, toi et ton compatriote souffrant — tu veux serieusement que ca me surprenne? Pour quel sot me prends-tu? Dis donc, qu'est-ce que tu penses de moi?[217]
— C'est un sujet qui ne donne pas beaucoup a penser. Tu es un petit bonhomme convenable, de bonne famille, d'une tenue appetissante, disciple docile de ses precepteurs et qui retournera bientot dans les plaines, pour oublier completement qu'il a jamais parle en reve ici et pour aider a rendre son pays grand et puissant par son travail honnete sur le chantier. Voila ta photographie intime, faite sans appareil. Tu la trouves exacte, j'espere?[218]
— Il y manque quelques details que Behrens y a trouves.[219]
— Ah, les medecins en trouvent toujours, ils s'y connaissent…[220]
— Tu parles comme Monsieur Settembrini. Et ma fievre? D'ou vient-elle?[221]
— Allons donc, c'est un incident sans consequence qui passera vite.[222]
— Non, Clawdia, tu sais bien que ce que tu dis la, n'est pas vrai, et tu le dis sans conviction, j'en suis sur. La fievre de mon corps et le battement de mon coeur harasse et le frissonnement de mes membres, c'est le contraire d'un incident, car ce n'est rien d'autre… — и его бледное лицо с вздрагивающими губами ниже склонилось к ней, — rien d'autre que mon amour pour toi, oui, cet amour qui m'a saisi a l'instant, ou mes yeux t'ont vue, ou, plutot, que j'ai reconnu, quand je t'ai reconnue toi, — et c'etait lui, evidemment, qui m'a mene a cet endroit…[223]
— Quelle folie![224]
— Oh, l'amour n'est rien, s'il n'est pas de la folie, une chose insensee, defendue et une aventure dans le mal. Autrement c'est une banalite agreable, bonne pour en faire de petites chansons paisibles dans les plaines. Mais quant a ce que je t'ai reconnue et que j'ai reconnu mon amour pour toi, — oui, c'est vrai, je t'ai deja connue, anciennement, toi et tes yeux merveilleusement obliques et ta bouche et ta voix, avec laquelle tu parles, — une fois deja, lorsque j'etais collegien, je t'ai demande ton crayon, pour faire enfin ta connaissance mondaine, parce que je t'aimais irraisonnablement, et c'est de la, sans doute c'est de mon ancien amour pour toi que ces marques me restent que Behrens a trouvees dans mon corps, et qui indiquent que jadis aussi j'etais malade…[225]
Его зубы стучали. Он вытащил одну ногу из-под скрипучего кресла и, продолжая фантазировать, выставил ее вперед, эту ногу, а коленом другой ноги коснулся пола, и вот он уже стоял преклонив колено, опустив голову и дрожа всем телом. — Je t'aime, — лепетал он, — je t'ai aimee de tout temps, car tu es le Toi de ma vie, mon reve, mon sort, mon envie, mon eternel desir…[226]
— Allons, allons![227] — сказала она. — Si tes precepteurs te voyaient…[228]
Но он с отчаянием покачал головой, склоняясь лицом к ковру, и ответил:
— Je m'en ficherais, je me fiche de tous ces Carducci et de la Republique eloquente et du progres humain dans le temps, car je t'aime![229]
Она осторожно погладила его по коротко остриженным волосам на затылке.
— Petit bourgeois! — сказала она. — Joli bourgeois a la petite tache humide. Est-ce vrai que tu m'aimes tant?[230]
Вдохновленный ее прикосновением, уже встав на оба колена, откинув голову и закрыв глаза, он продолжал:
— Oh, l'amour, tu sais… Le corps, l'amour, la mort, ces trois ne font qu'un. Car le corps, c'est la maladie et la volupte, et c'est lui qui fait la mort, oui, ils sont charnels tous deux, l'amour et la mort, et voila leur terreur et leur grande magie! Mais la mort, tu comprends, c'est d'une part une chose mal famee, impudente qui fait rougir de honte; et d'autre part c'est une puissance tres solennelle et tres majestueuse, — beaucoup plus haute que la vie riante gagnant de la monnaie et farcissant sa panse, — beaucoup plus venerable que le progres qui bavarde par les temps, — parce qu'elle est l'histoire et la noblesse et la piete et l'eternel et le sacre qui nous fait tirer le chapeau et marcher sur la pointe des pieds… Or, de meme, le corps, lui aussi, et l'amour du corps, sont une affaire indecente et facheuse, et le corps rougit et palit a sa surface par frayeur et honte de lui-meme. Mais aussi il est une grande gloire adorable, image miraculeuse de la vie organique, sainte merveille de la forme et de la beaute, et l'amour pour lui, pour le corps humain, c'est de meme un interet extremement humanitaire et une puissance plus educative que toute la pedagogie du monde!.. Oh, enchantante beaute organique qui ne se compose ni de teinture a l'huile ni de pierre, mais de matiere vivante et corruptible, pleine du secret febrile de la vie et de la pourriture! Regarde la symetrie merveilleuse de l'edifice humain, les epaules et les hanches et les mamelons fleurissants de part et d'autre sur la poitrine, et les cotes arrangees par paires, et le nombril au milieu dans la mollesse du ventre, et le sexe obscur entre les cuisses! Regarde les omoplates se remuer sous la peau soyeuse du dos, et l'echine qui descend vers la luxuriance double et fraiche des fesses, et les grandes branches des vases et des nerfs qui passent du tronc aux rameaux par les aisselles, et comme la structure des bras correspond a celle des jambes. Oh, les douces regions de la jointure interieure du coude et du jarret avec leur abondance de delicatesses organiques sous leurs coussins de chair! Quelle fete immense de les caresser ces endroits delicieux du corps humain! Fete a mourir sans plainte apres! Oui, mon dieu, laisse-moi sentir l'odeur de la peau de ta rotule, sous laquelle l'ingenieuse capsule articulaire secrete son huile glissante! Laisse-moi toucher devotement de ma bouche l'Arteria femoralis qui bat au front de ta cuisse et qui se divise plus bas en les deux arteres du tibia! Laisse-moi ressentir l'exhalation de tes pores et tater ton duvet, image humaine d'eau et d'albumine, destinee pour l'anatomie du tombeau, et laisse-moi perir, mes levres aux tiennes![231]
Он открыл глаза, только когда сказал все это; откинув голову, простирая руки, в которых держал серебряный карандашик, он все еще стоял на коленях, трепеща и содрогаясь. Она сказала:
— Tu es en effet un galant qui sait solliciter d'une maniere profonde, a l'allemande.[232]
И она надела на него бумажный колпак.
— Adieu, mon prince Carnaval! Vous aurez une mauvaise ligne de fievre ce soir, je vous le predis.[233]
Она соскользнула с кресла, скользящей походкой направилась по ковру к двери, на пороге нерешительно остановилась, полуобернувшись к нему, подняв обнаженную руку и держась за косяк. Потом, вполголоса, бросила через плечо:
— N'oubliez pas de me rendre mon crayon.[234]
И вышла из комнаты.
— Tu as decidement raison de dire que tu parles en reve, mon ami.[192]
— Soit… Laisse-moi rever de nouveau apres m'avoir reveille si cruellement par cette cloche d'alarme de ton depart. Sept mois sous tes yeux… Et a present, ou en realite j'ai fait ta connaissance, tu me parles de depart![193]
— Je te repete, que nous aurions pu causer plus tot.[194]
— A ты хотела бы этого?
— Moi? Tu ne m'echapperas pas, mon petit. Il s'agit de tes interets, a toi. Est-ce que tu etais trop timide pour t'approcher d'une femme a qui tu parles en reve maintenant, ou est-ce qu'il y avait quelqu'un qui t'en a empeche?[195]
— Je te l'ai dit. Je ne voulais pas te dire «vous».[196]
— Farceur. Reponds donc, — ce monsieur beau parleur, cet Italien-la qui a quitte la soiree, — qu'est-ce qu'il t'a lance tantot?[197]
— Je n'en ai entendu absolument rien. Je me soucie tres peu de ce monsieur, quand mes yeux te voient. Mais tu oublies… il n'aurait pas ete si facile du tout de taire ta connaissance dans le monde. Il y avait encore mon cousin avec qui j'etais lie et qui incline tres peu a s'amuser ici: Il ne pense a rien qu'a son retour dans les plaines, pour se faire soldat.[198]
— Pauvre diable. Il est, en effet, plus malade qu'il ne sait. Ton ami italien du reste ne va pas trop bien non plus.[199]
— Il le dit lui-meme. Mais mon cousin… Est-ce vrai? Tu m'effraies.[200]
— Fort possible qu'il aille mourir, s'il essaye d'etre soldat dans les plaines.[201]
— Qu'il va mourir. La mort. Terrible mot, n'est-ce pas? Mais c'est etrange, il ne m'impressionne pas tellement aujourd'hui, ce mot. C'etait une facon de parler bien conventionnelle, lorsque je disais «Tu m'effraies». L'idee de la mort ne m'effraie pas. Elle me laisse tranquille. Je n'ai pas pitie — ni de mon bon Joachim ni de moi-meme, en entendant qu'il va peut-etre mourir. Si c'est vrai, son etat ressemble beaucoup au mien et je ne le trouve pas particulierement imposant. Il est moribond, et moi, je suis amoureux, eh bien! — Tu as parle a mon cousin a l'atelier de photographie intime, dans l'antichambre, tu te souviens.[202]
— Je me souviens un peu.[203]
— Donc ce jour-la Behrens a fait ton portrait transparent![204]
— Mais oui.[205]
— Mon dieu. Et l'as-tu sur toi?[206]
— Non, je l'ai dans ma chambre.[207]
— Ah, dans ta chambre. Quant au mien, je l'ai toujours dans mon portefeuille. Veux-tu que je te le fasse voir?[208]
— Mille remerciements. Ma curiosite n'est pas invincible. Ce sera un aspect tres innocent.[209]
— Moi, j'ai vu ton portrait exterieur. J'aimerais beaucoup mieux voir ton portrait interieur qui est enferme dans ta chambre… Laisse-moi demander autre chose! Parfois un monsieur russe qui loge en ville vient te voir. Qui est-ce? Dans quel but vient-il, cet homme?[210]
— Tu es joliment fort en espionnage, je l'avoue. Eh bien, je reponds. Oui, c'est un compatriote souffrant, un ami. J'ai fait sa connaissance a une autre station, balneaire, il y a quelques annees deja. Nos relations? Les voila: nous prenons notre the ensemble, nous fumons deux ou trois papiros, et nous bavardons, nous philosophons, nous parlons de l'homme, de Dieu, de la vie, de la morale, de mille choses. Voila mon compte rendu. Es-tu satisfait?[211]
— De la morale aussi! Et qu'est-ce que vous avez trouve en fait de morale, par exemple?[212]
— La morale? Cela t'interesse? Eh bien, il nous semble qu'il faudrait chercher la morale non dans la vertu, c'est-a-dire dans la raison, la discipline, les bonnes moeurs, l'honnetete, — mais plutot dans le contraire, je veux dire: dans le peche, en s'abandonnant au danger, a ce qui est nuisible, a ce qui nous consume. Il nous semble qu'il est plus moral de se perdre et meme de se laisser deperir que de se conserver. Les grands moralistes n'etaient point des vertueux, mais des aventuriers dans le mal, des vicieux, des grands pecheurs qui nous enseignent a nous incliner chretiennement devant la misere. Tout ca doit te deplaire beaucoup, n'est-ce pas?[213] Великие моралисты вовсе не были добродетельными, они были порочными, искушенными в зле, великими грешниками, и они учат нас по-христиански склоняться перед несчастьем. Все это тебе, наверно, очень не нравится, правда?]
Он молчал. Он сидел все в той же позе, скрестив ноги под скрипучим креслом, наклонившись к лежащей женщине в бумажной треуголке, держал в руке ее карандаш и смотрел голубыми, как у Ганса-Лоренца Касторпа, глазами в глубину опустевшей комнаты. Пациенты разошлись. Звуки пианино, стоявшего в углу наискосок от обоих, лились теперь тихо и неровно, больной мангеймец наигрывал одной рукой, а подле него сидела учительница и листала какие-то ноты, лежавшие у нее на коленях. Когда беседа между Гансом Касторпом и Клавдией Шоша оборвалась, пианист совсем снял руку с клавиатуры и опустил ее, а фрейлейн Энгельгарт продолжала смотреть в нотную тетрадь. Четверо оставшихся от общества, которое веселилось здесь в карнавальную ночь, сидели неподвижно. Безмолвие продолжалось несколько минут. Медленно, все ниже и ниже склонялись под его грузом головы той пары у пианино, голова мангеймца — к клавиатуре, а фрейлейн Энгельгарт — к нотной тетради.
Наконец, точно по безмолвному соглашению, мангеймец и учительница тихонько встали и тихонько, втянув голову в плечи и деревянно опустив руки, стараясь не оглядываться на еще не опустевший угол, неслышно вышли вместе в читальню и удалились.
— Tout le monde se retire[214], — сказала мадам Шоша. — C'etaient les derniers; il se fait tard. Eh bien, la fete de carnaval est finie.[215] — И она подняла руки, чтобы снять бумажный колпак со своих рыжеватых кос, обвивавших венком ее голову. — Vous connaissez; les consequences, monsieur.[216]
Но Ганс Касторп помотал головой, не открывая глаз и не меняя своей позы. Он ответил:
— Jamais, Clawdia. Jamais je te dirai «vous», jamais de la vie ni de la mort, если можно так выразиться, а следовало бы. Cette forme de s'adresser a une personne, qui est celle de l'Occident cultive et de la civilisation humanitaire, me semble fort bourgeoise et pedante. Pourquoi, au fond, de la forme? La forme, c'est la pedanterie elle-meme! Tout ce que vous avez fixe a l'egard de la morale, toi et ton compatriote souffrant — tu veux serieusement que ca me surprenne? Pour quel sot me prends-tu? Dis donc, qu'est-ce que tu penses de moi?[217]
— C'est un sujet qui ne donne pas beaucoup a penser. Tu es un petit bonhomme convenable, de bonne famille, d'une tenue appetissante, disciple docile de ses precepteurs et qui retournera bientot dans les plaines, pour oublier completement qu'il a jamais parle en reve ici et pour aider a rendre son pays grand et puissant par son travail honnete sur le chantier. Voila ta photographie intime, faite sans appareil. Tu la trouves exacte, j'espere?[218]
— Il y manque quelques details que Behrens y a trouves.[219]
— Ah, les medecins en trouvent toujours, ils s'y connaissent…[220]
— Tu parles comme Monsieur Settembrini. Et ma fievre? D'ou vient-elle?[221]
— Allons donc, c'est un incident sans consequence qui passera vite.[222]
— Non, Clawdia, tu sais bien que ce que tu dis la, n'est pas vrai, et tu le dis sans conviction, j'en suis sur. La fievre de mon corps et le battement de mon coeur harasse et le frissonnement de mes membres, c'est le contraire d'un incident, car ce n'est rien d'autre… — и его бледное лицо с вздрагивающими губами ниже склонилось к ней, — rien d'autre que mon amour pour toi, oui, cet amour qui m'a saisi a l'instant, ou mes yeux t'ont vue, ou, plutot, que j'ai reconnu, quand je t'ai reconnue toi, — et c'etait lui, evidemment, qui m'a mene a cet endroit…[223]
— Quelle folie![224]
— Oh, l'amour n'est rien, s'il n'est pas de la folie, une chose insensee, defendue et une aventure dans le mal. Autrement c'est une banalite agreable, bonne pour en faire de petites chansons paisibles dans les plaines. Mais quant a ce que je t'ai reconnue et que j'ai reconnu mon amour pour toi, — oui, c'est vrai, je t'ai deja connue, anciennement, toi et tes yeux merveilleusement obliques et ta bouche et ta voix, avec laquelle tu parles, — une fois deja, lorsque j'etais collegien, je t'ai demande ton crayon, pour faire enfin ta connaissance mondaine, parce que je t'aimais irraisonnablement, et c'est de la, sans doute c'est de mon ancien amour pour toi que ces marques me restent que Behrens a trouvees dans mon corps, et qui indiquent que jadis aussi j'etais malade…[225]
Его зубы стучали. Он вытащил одну ногу из-под скрипучего кресла и, продолжая фантазировать, выставил ее вперед, эту ногу, а коленом другой ноги коснулся пола, и вот он уже стоял преклонив колено, опустив голову и дрожа всем телом. — Je t'aime, — лепетал он, — je t'ai aimee de tout temps, car tu es le Toi de ma vie, mon reve, mon sort, mon envie, mon eternel desir…[226]
— Allons, allons![227] — сказала она. — Si tes precepteurs te voyaient…[228]
Но он с отчаянием покачал головой, склоняясь лицом к ковру, и ответил:
— Je m'en ficherais, je me fiche de tous ces Carducci et de la Republique eloquente et du progres humain dans le temps, car je t'aime![229]
Она осторожно погладила его по коротко остриженным волосам на затылке.
— Petit bourgeois! — сказала она. — Joli bourgeois a la petite tache humide. Est-ce vrai que tu m'aimes tant?[230]
Вдохновленный ее прикосновением, уже встав на оба колена, откинув голову и закрыв глаза, он продолжал:
— Oh, l'amour, tu sais… Le corps, l'amour, la mort, ces trois ne font qu'un. Car le corps, c'est la maladie et la volupte, et c'est lui qui fait la mort, oui, ils sont charnels tous deux, l'amour et la mort, et voila leur terreur et leur grande magie! Mais la mort, tu comprends, c'est d'une part une chose mal famee, impudente qui fait rougir de honte; et d'autre part c'est une puissance tres solennelle et tres majestueuse, — beaucoup plus haute que la vie riante gagnant de la monnaie et farcissant sa panse, — beaucoup plus venerable que le progres qui bavarde par les temps, — parce qu'elle est l'histoire et la noblesse et la piete et l'eternel et le sacre qui nous fait tirer le chapeau et marcher sur la pointe des pieds… Or, de meme, le corps, lui aussi, et l'amour du corps, sont une affaire indecente et facheuse, et le corps rougit et palit a sa surface par frayeur et honte de lui-meme. Mais aussi il est une grande gloire adorable, image miraculeuse de la vie organique, sainte merveille de la forme et de la beaute, et l'amour pour lui, pour le corps humain, c'est de meme un interet extremement humanitaire et une puissance plus educative que toute la pedagogie du monde!.. Oh, enchantante beaute organique qui ne se compose ni de teinture a l'huile ni de pierre, mais de matiere vivante et corruptible, pleine du secret febrile de la vie et de la pourriture! Regarde la symetrie merveilleuse de l'edifice humain, les epaules et les hanches et les mamelons fleurissants de part et d'autre sur la poitrine, et les cotes arrangees par paires, et le nombril au milieu dans la mollesse du ventre, et le sexe obscur entre les cuisses! Regarde les omoplates se remuer sous la peau soyeuse du dos, et l'echine qui descend vers la luxuriance double et fraiche des fesses, et les grandes branches des vases et des nerfs qui passent du tronc aux rameaux par les aisselles, et comme la structure des bras correspond a celle des jambes. Oh, les douces regions de la jointure interieure du coude et du jarret avec leur abondance de delicatesses organiques sous leurs coussins de chair! Quelle fete immense de les caresser ces endroits delicieux du corps humain! Fete a mourir sans plainte apres! Oui, mon dieu, laisse-moi sentir l'odeur de la peau de ta rotule, sous laquelle l'ingenieuse capsule articulaire secrete son huile glissante! Laisse-moi toucher devotement de ma bouche l'Arteria femoralis qui bat au front de ta cuisse et qui se divise plus bas en les deux arteres du tibia! Laisse-moi ressentir l'exhalation de tes pores et tater ton duvet, image humaine d'eau et d'albumine, destinee pour l'anatomie du tombeau, et laisse-moi perir, mes levres aux tiennes![231]
Он открыл глаза, только когда сказал все это; откинув голову, простирая руки, в которых держал серебряный карандашик, он все еще стоял на коленях, трепеща и содрогаясь. Она сказала:
— Tu es en effet un galant qui sait solliciter d'une maniere profonde, a l'allemande.[232]
И она надела на него бумажный колпак.
— Adieu, mon prince Carnaval! Vous aurez une mauvaise ligne de fievre ce soir, je vous le predis.[233]
Она соскользнула с кресла, скользящей походкой направилась по ковру к двери, на пороге нерешительно остановилась, полуобернувшись к нему, подняв обнаженную руку и держась за косяк. Потом, вполголоса, бросила через плечо:
— N'oubliez pas de me rendre mon crayon.[234]
И вышла из комнаты.